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Vaccination contre le Covid-19 : pourquoi la généralisation d'une dose de rappel pour tous les adultes en France se précise

La Haute Autorité de santé a étendu vendredi ses recommandations en préconisant une dose de rappel du vaccin contre le Covid-19 pour les 40 ans et plus. En attendant une prochaine généralisation à toute la population adulte, comme viennent de le décider les Etats-Unis.

Article rédigé par franceinfo
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Une membre du personnel de santé d'un centre de vaccination à Dinan (Côtes d'Armor), le 14 septembre 2021. (MARTIN BERTRAND / HANS LUCAS / AFP)

Les personnes vaccinées contre le Covid-19 en France auront-elles bientôt toutes le droit à une nouvelle injection ? La Haute Autorité de santé (HAS) a recommandé, vendredi 19 novembre, l'administration d'une dose de rappel de vaccin contre le Covid-19 pour tous les adultes âgés de 40 ans et plus (une deuxième ou une troisième injection, selon les cas, d'un vaccin à ARN messager). Alors qu'une annonce pour les 50 ans et plus était attendue ces derniers jours, l'avis de la HAS va donc au-delà en rendant potentiellement éligibles plusieurs millions de personnes supplémentaires dès maintenant.

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Jusqu'à présent, seules les personnes de plus de 65 ans, les résidents des Ehpad, les personnes à très haut risque de forme grave (présentant des comorbidités ou immunodéprimées), les professionnels de santé, les pompiers et les proches de personnes immunodéprimées pouvaient avoir accès à un rappel de vaccin en France. De l'autre côté de l'Atlantique, les autorités américaines ont quant à elles donné leur feu vert vendredi à un rappel pour tous les adultes vaccinés depuis au moins six mois. Il est désormais très probable que la France suive cette voie rapidement. Franceinfo vous explique pourquoi.

Parce que l'efficacité des vaccins diminue avec le temps

Les vaccins "perdent une partie de leur efficacité après cinq à six mois, d'où l'intérêt d'une dose de rappel", a défendu le président du Conseil scientifique Covid-19, Jean-François Delfraissy, mercredi sur France Inter"Les études les plus récentes confirment une baisse au cours du temps de l'efficacité vaccinale observée en vie réelle contre les infections liées au variant Delta (de 30 à 70%)", rappelle également la HAS dans un avis rendu le 6 octobre 2021.

En cause : "La conjonction d'une moindre efficacité des vaccins vis-à-vis du variant Delta et de la diminution progressive de l'efficacité vaccinale à distance du schéma avec deux doses de vaccin", explique l'institution, en se basant sur l'état des connaissance actuelles. Une étude parue début novembre dans The New England Journal of Medicinemontre ainsi que l'efficacité du vaccin de Pfizer et BioNTech baisse d'environ 6% en moyenne tous les deux mois. 

C'est d'ailleurs cette efficacité décroissante qui avait justifié l'organisation de la campagne de rappel pour les populations les plus fragiles, vaccinées à partir de fin décembre 2020. Pour cette population, les autorités recommandent l'administration d'une troisième dose six mois après la dernière injection du vaccin de Pfizer, Moderna ou AstraZeneca. 

"Bien que cette baisse progressive de la protection au cours des six mois suivant la primo-vaccination soit essentiellement observée chez les plus âgés, certaines études rapportent qu'elle est constatée dans tous les groupes d'âge (plus de 18 ans)", souligne la HAS. Or, la vaccination des plus de 50 ans a été ouverte le 19 février, et celle de toutes les personnes majeures sans comorbidité, le 12 mai. La période de six mois nécessaire avant l'injection d'une dose de rappel est donc respectivement révolue depuis la mi-août et la mi-novembre, pour les personnes n'ayant eu besoin que d'une injection car ayant été contaminées au Covid-19. Les premiers double-vaccinés de ces deux catégories sont en théorie susceptibles de recevoir une troisième dose depuis début octobre pour les plus de 50 ans, et à partir de début janvier pour les autres majeurs. En tablant sur le même calendrier que pour les populations vaccinées en priorité, il serait donc logique que la troisième dose leur soit ouverte prochainement.

Parce que les études sur la dose de rappel sont rassurantes

L'état de la science actuel témoigne de l'efficacité et de la sûreté de la dose de rappel. Une étude parue dans The Lancet*, sur environ 1,5 million de personnes à l'âge moyen de 52 ans, montre qu'une semaine après la dose de rappel, l'efficacité d'un vaccin à ARN messager (Pfizer-BioNTech ou Moderna) contre le risque d'hospitalisation était de 93% (il y avait 29 cas dans ceux ayant reçu la dose de rappel contre 231 dans le groupe témoin de la même taille qui ne l'avait pas reçue). L'efficacité de la troisième dose était de 81% contre le risque de décès (sept morts dans le groupe ayant été vacciné avec une dose de rappel contre 44 dans celui n'ayant pas reçu cette dose). 

Une étude britannique confirme ces résultats. Deux semaines après avoir reçu une dose de rappel des vaccins AstraZeneca ou Pfizer-BioNTech, la protection contre l'apparition de symptômes en cas de contamination chez les adultes de plus de 50 ans était respectivement de 93% et 94%, rapportent les autorités britanniques*. 

Par ailleurs, la tolérance au vaccin semble aussi bonne que lors des premières injections. Une étude* des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) américains note que sur près de 12 600 personnes ayant bénéficié d'une dose de rappel, un peu plus de 70% de celles ayant été vaccinées avec trois doses de Pfizer-BioNTech et un peu plus de 80% de celles ayant été vaccinées avec trois doses de Moderna rapportent des effets localisés (douleurs au bras, démangeaisons...) ou systémiques (fatigue, fièvre, maux de tête...) dans les sept jours suivant l'injection, soit des taux comparables à ceux relevés après la deuxième dose. Les effets secondaires rares, comme les myocardites, ne sont pas plus fréquents, selon l'état des lieux dressés par la HAS début novembre.

Parce que la "cinquième vague est là"

Outre le manque de publications scientifiques sur la baisse de l'efficacité vaccinale, la HAS avait conclu début octobre qu'imposer une dose de rappel à la population n'était pas nécessaire en raison de "la situation sanitaire actuelle, dont les indicateurs s'améliorent". En revanche, elle soulignait que "l'administration d'une dose de rappel deviendra[it] probablement nécessaire au cours des mois qui viennent".

Or depuis, la situation épidémique s'est dégradée. "La cinquième vague est là depuis la mi-octobre", a affirmé le président du Conseil scientifique, mercredi sur France Inter. Après la décrue amorcée à la fin de l'été, les contaminations (et tous les indicateurs) sont en effet reparties à la hausse, même si les hospitalisations et les décès ne suivent pour l'instant pas la courbe de l'automne 2020. C'est donc pour cette raison que la HAS a revu sa copie par rapport à sa précédente recommandation.

Parce que la France dispose de suffisamment de doses

La pénurie de doses pourrait-elle être une raison pour ralentir la campagne de rappel ? Pas à en croire les chiffres du ministère de la Santé. "Environ 25 millions de personnes sont susceptibles de recevoir un rappel", assurait ce dernier, dans une note du 21 octobre (PDF) qui prend en compte les critères en vigueur avant l'avis rendu par la HAS vendredi. Parmi ces personnes éligibles jusqu'ici, environ 5 millions ont déjà reçu leur dose de rappel, a assuré jeudi le porte-parole du gouvernement.

Au total, si l'ensemble de la population avec un schéma vaccinal complet est, à terme, déclarée éligible à un rappel, il faudra vacciner 50,5 millions de personnes, selon les données du ministère de la Santé. La France dispose-t-elle d'assez de stocks pour cela ? Au 18 novembre, près de 28,6 millions de doses de vaccins Pfizer-BioNTech et Moderna étaient disponibles, selon cette même source. Par ailleurs, plus de 65 millions de doses sont commandées pour des livraisons prévues jusqu'en juillet 2022, là encore selon les chiffres du ministère. Il y aura donc de quoi injecter une dose de rappel à tous ceux qui le souhaitent.

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